lundi 11 octobre 2010

Jock Sturges ou la nudité controversée !

En matière de controverses relatives à des photographies naturistes, le cas du photographe américain Jock Sturges, est un bel exemple.

Jock Sturges a longtemps fait l’objet de controverses pour son approche distinctive de la photographie de nu.
Heureusement, il est surtout connu pour ses nus réalisés dans des environnements naturistes.
Son travail se composant essentiellement de photos de familles, d'adultes, de filles et de garçons, d'enfants, le plus souvent nus.

Ses endroits de prédilection sont les lieux naturistes, entre autres ceux de l'ouest de la France (le plus souvent à Montalivet), mais aussi en Italie ou en Californie.

Il est lui-même naturiste.
Eh oui, comme moi, ...

Sturges vise à extraire la sensibilité propre de ses modèles d’une manière simple, personnelle, non-voyeuriste.

Sturges dit considérer tous ses modèles avec respect. Selon lui, s’il partage une certaine intimité, il n’y a jamais de voyeurisme.

Je suis d’accord avec lui, c’est ma vision des choses. J'aime la difficulté qui consiste à extraire le ressenti de la personne devant sa nudité.

Et j'ai toujours éprouvé un profond respect pour mes modèles car, je l'écrit souvent, il faut le faire de poser nue.
Que celles et ceux qui crient au scandale essaient, après, nous pourrons en parler.

Dans ses écrits, Sturges se targue sur les liens de confiance, l'amitié et la collaboration entre le photographe, les modèles et leurs familles. Plusieurs de ses photographies montrent plusieurs générations nus ensemble.

Ses clichés veulent être des témoignages du passage du temps sur les êtres, de l’inéluctable transformation à laquelle sont voués tous les corps.

Du passage de l’enfance à l’âge adulte, de la maternité à l’indépendance des enfants, toutes ces étapes sont recherchées par Sturges.

Jock Sturges suit également certains de ces modèles, qu'il aime retrouver d'une année à l'autre.

Ainsi une femme, prise en photo alors qu'elle était enceinte, peut être retrouvée en photo avec l'enfant qu'elle portait.

Misty Dawn, l'un des modèles de Jock Sturges, a été photographiée pendant une période de 25 ans.

C'est donc cette temporalité qui fait la particularité de Sturges : photographier la même personne à des périodes différentes de sa vie, ou photographier en même temps des personnes d'âges différents.
N’est-ce pas ce que je fais avec Annick depuis plus de 25 ans ?

Certains critiques ont condamné son travail en l’accusant de se cacher derrière le manteau des beaux-arts pour, en réalité, ne faire que de la pornographie à peine déguisée impliquant des mineurs d’âge. Sturges et ses défenseurs ont souligné l’innocence de ses photos nues d'adolescents.

Sur un plan législatif cette fois, Sturges reproche la division arbitraire des personnes et de leurs organes en adultes sexuels (plus de 18 ans) et soi-disant les enfants asexués (moins 18 ans).
La question est pertinente, ce qui me renvoie à l’article précédent sur l’interdiction aux moins de 18 ans de visiter cette exposition photographique de Larry CLARCK à Paris.

Pourquoi 18 ans ?

Mais aussi de poser la question réelle sur cette fatigante et révoltante vision exclusivement sexuelle de la nudité qu’elle concerne les enfants, les ados, les adultes.
Comme si, tout devait se résumer uniquement à cette vision sexuelle des choses sans admettre qu’il puisse y avoir d’autres visions, non sexuelles, de la nudité !

La question se pose alors de savoir si lorsque l’art et le bon goût sont présents, pourquoi il ne pourrait pas être autorisé de présenter des photographies d’adolescents nus ?
La photographie de Jock Sturges présente un argument puissant pour l’affirmer.
MAIS ! En quelle société hypocrite vit-on ?

En avril 1990, des agents du FBI ont perquisitionné son studio, confisqué son équipement et son travail, et ont allégué que ses photographies relevaient de la pornographie juvénile. Le monde de l'art et les communautés naturistes étaient furieux, et ont publiquement défendu Jock STURGES.
Après plus d'un an d'enquête, l'affaire a été rejetée par un grand jury. Jock Sturges a depuis récupéré tout son matériel, mais de nombreux négatifs auraient été abîmés, et cette affaire lui aurait fait perdre 100 000$ en frais de justice.

Dans le milieu des années 1990, son travail a été à nouveau attaqué, cette fois par des chrétiens conservateurs dirigés par l'opération de sauvetage dirigée par Randall Terry, mieux connu pour les manifestations anti-avortement, et de Focus on the Family dirigé par James Dobson.

Les manifestants ont manifesté devant les grandes librairies à travers les Etats-Unis pour dénoncer les livres de Jock Sturges, de David Hamilton et d'autres qui comprenait des photographies d'adolescents nus.
Dans certains magasins, les manifestants ont commis ouvertement la désobéissance civile en vandalisant ces livres. Et dans deux cas (deux dans le Sud), ils ont réussi à convaincre les procureurs de mettre en accusation les librairies Barnes & Noble sur accusations de pornographie juvénile et d'obscénité.
Encore une fois, Sturges a reçu un fort soutien public venant des milieux artistiques et civils et aussi des communautés naturistes.
Un ami me disait récemment : tout cela dépend du regard que l’on porte sur la nudité !

Il a raison.
Un naturiste ne pose pas le même regard sur la nudité qu’un non-naturiste.
Un artiste qui traite le nu, féminin comme masculin, ne porte pas le même regard sur la nudité. Il y recherche la sublimité, que le corps nu soit jeune, ado ou adulte.

Un obsédé sexuel ne porte pas le même regard sur la nudité qu’un être équilibré, normal. Il n’y voit qu’un objet de convoitise, d’assouvissement de ses frustrations.

En conclusion, certaines et certains voudraient voir, dans le reflet artistique de la nudité révélée par un artiste, l’objet de leurs angoisses, de leur mal-être devant la nudité tout court.

Alors, il est souvent plus facile de dénoncer, d’accuser, de crier aux loups plutôt que de se regarder devant sa propre glace et de faire l’analyse objective de ce que l’on y voit.

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